12 juin 2014

COSMOPOLIS EST UNE PHOTOGRAPHIE !

David Cronenberg était en compétition à Cannes, de nouveau avec Robert Pattinson et Peter Suschitzky pour la photographie, avec Maps To The Stars.

« Un rat devint l'unité d'échange » Zbigniew Herbert, poète. Voici une proposition fictive moyennement sexy, voire pas du tout. Pourtant Eric, prend son pied dans cette journée où il pense qu'on va le tuer. Depuis sa limousine blindée, bardée d'écrans, où il assouvit ses pulsions, il orchestre son système génial dans la finance. Cosmopolis, adapté du roman de Don DeLillo, est un huis clos dans une longue voiture, impersonnelle de l'extérieur, merveilleuse à l'intérieur. Entre les moments où Eric baise et les moments où il voudrait baiser un constat : l'argent l'excite. Voici donc deux scènes de cul tout à fait probables, où on fantasme mais on ne touche plus.


Sexifier l'argent :


Eric Packer estime autant être à son bureau lorsqu'il est dans sa voiture. Elle représente un prolongement de ses affaires comme de lui-même. Blanche de l'extérieur, il doit demander à son garde du corps laquelle est la sienne. Hyper centralisée à l'intérieur, il force ses collaborateurs à venir à lui pour rendre leurs analyses. Aujourd'hui, il a décidé d'aller chez son coiffeur. Qu'importe que les rues soient barrées par la venue du Prédisent et d'un cortège pour un rappeur décédé.
Il a pris l'habitude de subir un check-up quotidien. De cette façon, il s'enquière à la fois de la santé de son business et de sa propre santé. Ça ne fait qu'un pour lui, tout revenant au même pour celui qui estime être plus important que le Président. Il a développé un algorithme basé sur un modèle naturel ressemblant aux fractales. Il est évident pour lui d'être en synergie avec ce qu'il produit – le capital.
Cette première scène est géniale parce que l'un des moments les plus sexuels du film n'est pas une scène de sexe, mais un check-up médical joint à un rapport d'expertise financière : Jane l'a rejoint au cours de son jogging, elle transpire, elle est essoufflée. Haletante, elle lui fait un rapport de la situation tandis qu'Eric subit un toucher de la prostate par l'associé de son médecin. C'est un cas urgent : le yuan remonte, plombant les capitaux de Eric. Il y a donc urgence sanitaire.
Eric a certainement pris l'habitude des toucher rectaux, tout autant que des rapports techniques de sa collaboratrice. Bien que lorsqu'il parle, sa voix et son visage soient perturbés par le massage prostatique, il l'écoute attentivement, sent son odeur, voit ses mains et ses cuisses se crisper sur sa bouteille en plastique, fantasme sur ses théories du dépassement de seuil de la monnaie chinoise. Elle lui parle en le regardant dans les yeux, ne décroche jamais dans ses propos, ne regarde jamais son corps, pas même son torse. Pour ainsi considérer les choses, que ce soit dans leur attitude, dans les reflets de lumière très doux sur lui et très contrastés sur elle - à cause de la sudation, ou encore par ces néons parfaitement peep-show, ces personnages sont sexuellement excités par l'argent. C'est une hypertrophie du système monétaire de cette fiction : à tel point satisfaits et heureux de l'argent qu'ils en deviennent amoureux ou pervers. Nul besoin de montrer le moindre billet de tout le film, ils ont ce vice sur leur chair. Qu'il ait plusieurs partenaires dans la même journée n'est pas le propos pour lui, il peut encore bander pour ceux qui représentent son argent.
On en retient l'image d'un géant ou d'un demi-dieu qui tient le monde dans sa main. Un microcosme dans une voiture. C'est parce qu'il est dans sa limousine qu'il se sent en pleine maitrise de la situation. Il a le contrôle lorsqu'il est dans sa voiture et ce sont les autres qui doivent venir à lui. Alors à contrario, que se passe-t-il lorsqu'il est dehors ?

Erotiser les mots:


Eric force les gens à venir dans sa voiture, comme nous venons de le voir. Pourtant, il demeure un personnage pour qui il sort de sa limousine, Elise, qu'il a récemment épousée. Lorsqu'on la découvre dans son taxi, à travers la fenêtre de la limousine, le montage le fait passer de l'intérieur de sa voiture à l'intérieur de la sienne en deux plans, puis une ellipse les installe directement dans la cantine où ils déjeunent. Pour cette scène, un gros plan sur un livre les placent dans une bibliothèque avant d'être installés au comptoir d'une cantine. La première scène de déjeuner est filmée en grand angle par dessus, en champ et contre-champ, dans un diner aux tons pastels. Une troisième caméra se situe sur le trottoir pour capter leurs visages mais surtout, le reflet des passants : l'extérieur existe, mais toujours derrière une vitre. Dans cette seconde scène, les stores sont baissés, les couleurs sont dorées et neutres, c'est donc un intérieur comme Eric les aime. Il n'a pourtant aucun contrôle. Pas d'extérieur physique mais tout de même, un monde en dehors de son monde à lui.
La deuxième scène de déjeuner est introduite ainsi : « Nous sommes des gens de ce monde, on doit se nourrir et échanger. » Mais il n'arrive pas à convaincre sa femme de la baiser, pas plus que de consommer leur union. Aucune approche ne fonctionne avec cette femme qui fini par planter son regard dans le sien et lui souffler au visage : « du sexe », comme pour révéler toute la saleté qu'elle éprouve pour cette pratique. La femme froide dévoile son côté reptilien : elle siffle. Elise tout aussi chromatique que le lieu, semble se fondre dans les murs et le mobilier. Autant qu'il ne peut pas la saisir, elle demeure insensible aux endroits où ils mangent, tous moins élégants les uns que les autres. Eric est de toute manière débraillé, décoiffé et sans cravate. Et c'est tout ce qu'il demande à découvrir, comment se sentir sale, comment dépasser les limites, comment « aller dans une ruelle, bousculer les poubelles ». Et c'est ce qu'elle retient : il est sale à cause du sexe. Sous son aspect le plus humain, elle réprouve les corps, elle qui vit de son esprit. Et tandis que le déclin de Eric semble se matérialiser par son allure de moins en moins nette, Elise elle, demeure riche et parfaitement lisse. Dedans, la pulsion, dehors, la répulsion.


En somme, l'intérieur lubrique de la limousine représente le contrôle et la sécurité par l'argent, la paranoïa et l'excitation sexuelle. Certains parleraient de centralisation du pouvoir. L'extérieur représente la vie humaine, où il a besoin de manger et d'aimer sa femme, ainsi que de lutter pour sa survie comme n'importe lequel de ces quidams, qui manifestent contre le Président et Wall-Street. Mais ce qui demeure du film, au-delà de la projection politique, ou de la métaphore de l'argent virtuel, c'est cette idée d'un héros absolu qui s'ennui et doute, et réalise qu'il n'y a rien de plus réel et enviable que la simple chair et la sensation dermique.


David Cronenberg, Cosmopolis (2012)

d'après le roman de Don DeLillo, Cosmopolis (2003)

photographie : Peter Suschitzky

Avec Robert Pattinson

© Damien Lamy 2014
WWW.PHOTODAMIENLAMY.COM

15 mai 2014

LOST IN TRANSLATION EST UNE PHOTOGRAPHIE !

D'autres images sur mon album Pinterest ! (cliquez pour lire la suite)

Sofia Coppola expliquait à son père préférer tourner Lost In Translation en pellicule qu'en digital, « parce que ça semble plus romantique »*. Chez elle, on a souvent dit que les jeunes filles qui s'ennuient étaient une mise en abîme de sa propre jeunesse hollywoodienne. Pour Lost In Translation, certains ont avancé que le personnage de Charlotte était autobiographique parce qu'elle était mariée au photographe et réalisateur Spike Jonze. Ce qui signifierait qu'on rêve tous d'un ailleurs... L'autre bout du monde, ou l'envers de la Terre, où nous ne pourrions avoir aucun repère : heures, espaces, langues, écritures, culture, repas... Lost In Translation se passe ainsi à Tokyo. Bob et Charlotte sont perdus dans une ville où ils ne trouvent pas le sommeil. Ils se croisent, cherchent à se croiser puis se fréquentent, lui est en fin de carrière, elle se cherche : leur histoire est précisément romantique. Voici en deux reflets une tentative de représenter Tokyo la Romantique, d'abord parce qu'elle symboliserait le rêve, puis parce qu'elle porterait cette part de poésie.

Lost In Translation, 2003

TOKYO EST UN RÊVE

La carton de générique, inspiré des peintures de John Kacere, nous accueille avec Charlotte allongée sur le côté, nous tournant le dos. Elle porte une culotte rose et un maillot gris. Girl next door. Puis le film ouvre de nuit, sur Bob se réveillant dans son taxi à l'entrée de la ville. Les publicités animées sur les façades de la rue produisent une lumière forte. L'acteur se voit sur une publicité Suntory gigantesque, il se frotte les yeux. Très vite un problème se pose : comment dormir, entre la nuit fourmillante et le décalage horaire ? Il rencontre ainsi Charlotte au bar de l'hôtel, qui a le même souci. Plus tard au détour du sauna, puisqu'ils se sont croisés quelques fois, Charlotte lui propose de l'accompagner en ville, rejoindre son ami Charlie. Ils passent la nuit à arpenter les bars, appartements et karaoké de la ville dans des ambiances lumineuses très douces et pour peu, oniriques.
Dans ce plan illustré, Charlotte et Bob rentrent à l'hôtel en taxi et Bob dort déjà. Le début du chapitre est composée de plans nocturnes plus ou moins flous de paysages urbains, des ponts par exemple – Sofia Coppola a reconstitué certains plans d'après des photographies qu'elle avait prise de Tokyo. Il semble que Sofia Coppola soit l'auteure de ce plan dirigé par Lance Acord – déjà présent depuis Lick The Star (1998) et aux côtés de Spike Jonze - orienté depuis l'extérieur de la voiture vers la portière, qui filme le visage de Charlotte au travers de la vitre colorée. Comparé à un travelling classique, qui aurait filmé directement les façades depuis la voiture, ce contre-champ montre le taxi, la rue, le reflet des abords et des néons, et Charlotte : comme un plan d'ensemble compact et pluridimensionnel.
Charlotte contemple maintenant les enseignes lumineuses sur les façades des immeubles. Elle-même au ras du sol, elle lève les yeux vers les stries de lumières tentaculaires. Comme pour plusieurs scènes, ce sont les reflets qui sont filmés. On voit à la fois ce qu'elle voit et ce qu'elle ressent sur son visage. Elle regarde un instant Bob. Ainsi reflétées sur la vitre arrière du taxi, les lumières deviennent des phosphènes, des taches colorées géantes qui dansent devant nous quand on cligne des yeux. Bob dort, les néons glissent sur son visage, la nuit est enfin un souvenir paisible où elle sent la présence de quelqu'un : Charlotte se noie finalement dans ses songes. Le plan de fin suit Bob qui la porte jusqu'à sa chambre ; un sentiment est désormais certain : il se passe quelque chose de nouveau entre eux.



Lost In Translation, 2003

TOKYO EST POÉTIQUE

Nous pourrions dire beaucoup de choses sur la façon de filmer un double vitrage à cause de la diffraction de la lumière à travers le verre et l'air, bref... Mais toute la romance se crée encore une fois dans la projection des personnages : la caméra en surplomb du lit, tournée vers l'extérieur, filme leurs reflets en plongée dans la vitre. Une simple lampe de chevet les éclaire par l'arrière, la télé émet une lueur bleue sur leurs visages. Loin dans les rues, les lumières ne sont que des points translucides. Tous les plans de chambre du film, même les plus délicats, sont filmés directement ; on pense à cette très belle série de portraits de Charlotte sur son lit, se maquillant ou accrochant une suspension en papier. Filmer les personnages montre ce qu'il se passe réellement. On note une première étape subjective, lorsque la caméra très proche oscille dans le dos de Charlotte, assise sur l'appui de la baie vitrée.
Au début de ce chapitre, tandis qu'elle tourne dans sa chambre d'hôtel, Charlotte reçoit un télégramme lui demandant si elle dort. Dans le plan suivant, installés sur le lit de Bob comme deux adolescents, ils regardent la télé en buvant du saké pour combattre l'ennui. Un nouvel échelon de sentiment se présente : ne pas trouver le sommeil seul et vouloir combattre l'ennui en restant avec l'autre. En filmant leurs reflets plutôt que les personnages eux-mêmes, nous basculons dans l'imagination : l'histoire nous fait espérer une idylle, une fantaisie. Leur tourner le dos et filmer leur reflet camoufle leur intimité, insinuant leur désir : c'est ce qu'on voudrait qu'il se passe. L'histoire est écrite pour ça. Un film est par essence une fiction ; ce qui se passe demeure fictif. Aller plus loin en mettant en scène des projections spatiales et émotionnelles, voilà la réussite de ce plan. En cela, considérer les points lumineux comme des étoiles et filmer techniquement un double vitrage, contient une seconde capacité, esthétique, d'une image mentale pas tout à fait claire, pas tout à fait réelle ni matérielle. Un possible, un désir, un rêve...

Lost In Translation est une sorte de rêve éveillé de deux personnes qui ne peuvent pas dormir. Errer ensemble la nuit incarnerait deux états de romance : d'abord le désir de la rencontre et de la joie de l'autre au détriment de la solitude, puis le désir de l'inconnu, du rêve ou de l'aventure contre l'ennui. C'est un sentiment de ville merveilleuse, qui reste au-delà de l'histoire de deux personnages ne se plaisant pas à Tokyo. L'histoire aurait pu se jouer ailleurs, car il reste beaucoup d'endroits où l'on ne parle pas anglais. Il est à parier qu'une fiction dans les Emirats nous emportera bientôt de manière inédite à 1km du sol. Mais ce doit justement être ce côté inattendu qui a fait de ce film un hymne à l'une des villes les plus spectaculaires de l'Orient du début XXIème siècle.

*"It feels more romantic" source IMDB

Sofia Coppola, Lost In Translation (2003)
Photographie : Lance Acord
Scarlett Johansson, Bill Murray


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© DAMIEN LAMY, PHOTOGRAPHE LYON, 2014
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13 mai 2014

DRIVE EST UNE PHOTOGRAPHIE !



Nicolas Winding Refn revient pour l'édition 2014 du festival de Cannes comme membre du jury ! Il a déjà été nominé en 2013 mais surtout, récompensé en 2011 pour Drive.

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C'est pendant un coup de blues dans la voiture de Ryan Gosling, que Nicolas Winding Refn a décidé de faire un film sur un type qui conduit sa voiture la nuit. La scénarisation du roman de James Sallis marqua le début de plusieurs collaborations entre les deux hommes. Ainsi Drive se passe à Los Angeles : un pilote, cascadeur le jour et conducteur pour truands la nuit, sent l'étau se resserrer sur lui lorsqu'il veut protéger sa voisine. C'est une sorte d'histoire d'amour qui tourne mal, le film jouant sur deux états : d'abord le pilote est en situation de défense, puis lorsque ça ne suffit plus, le pilote attaque. Dans un flot continu de couleurs vives, porté par une bande son tantôt pop tantôt minimaliste, un climat menaçant sous-tend le film. Une menace qui viendrait d'abord des autres, se tenant également sur leurs gardes, ne sachant pas à quel moment ils mourront. Puis une menace qui viendrait de la ville elle-même et des objets qu'elle personnifie, rues, voitures et feux tricolores en particulier. Le réalisateur rappelle à ce propos « [qu'] il se trouve que c'est un film sur un homme qui conduit une voiture, pas un film de voitures. »



LA MENACE DES AUTRES

Los Angeles est basée sur des mythes ayant tous l'air fondés : la mafia, les putes, les garages de grosses voitures, les braquages de prêteurs sur gage, Hollywood. Tous les personnages sont à peu près dans la merde. Sauf le pilote, aidant pourtant des truands à s'enfuir : son travail de nuit ne semble pas le mettre en danger autant que les autres puisqu'il conserve son anonymat. Il est maître de la situation comme dans la première scène de poursuite avec la police. Shannon, son agent et propriétaire du garage qui prépare ses véhicules, paraît bien plus vulnérable : il est en cheville avec Bernie Rose et son associé Nino. Il ne peut échapper à ceux qui le connaissent. Lorsqu'il aide le compagnon de sa voisine, la menace se rapproche d'un coup du pilote : il l'aide mais il met Irene en danger, mêlée de manière collatérale au dangereux Bernie Rose. Cherchant à la protéger elle, il doit se protéger lui-même face à un danger identifié. Le besoin de protection se transforme alors en défense puis en attaque. Au long des scènes de mort sauvages, le pilote plonge dans un deuxième état : attaquer par vengeance.
Dans la scène illustrée ci-dessus, proche de la fin du film, le pilote guette Nino jusqu'à ce qu'il remonte dans sa limousine. Le long de la côte, il percute sa voiture en surplomb d'une plage. Un plan depuis la banquette arrière montre le profil de Nino et une perspective dans l'obscurité par la portière. Démarrant en trombe, le pilote pulvérise la limousine en contre-bas. Dans le plan d'ensemble en contre-plongée depuis la plage où Nino s'est écrasé, la silhouette du pilote apparaît autant déterminée à tuer que la voiture : les phares et le pare-choc sont intacts ; les fumées projettent des faisceaux dans l'air, donnant un pouvoir invincible à la machine. Comme nous le verrons dans la seconde partie, elle devient plus nuisible que le pilote juste à côté. La course poursuite est particulièrement brève : une filature et un impact suffisent pour neutraliser le premier véhicule. Le pilote sachant exactement ce qu'il va faire, il devient le persécuteur, d'une précision absolue. Un projecteur rotatif illumine brièvement son visage, on discerne à peine l'écume de l'océan ; Nino comprend qu'il va mourir entre les mains d'une menace sortie de nulle part. Ce que révèle la concision du montage, c'est que le colossal Nino n'est pas réellement un obstacle pour parvenir au vrai monstre, Bernie. En portant son masque de doublure, le pilote sort définitivement de lui-même. Parce qu'il sait qu'il doit se plier à ses pulsions psychotiques pour survivre. Il a accepté d'être celui qui tue, celui qui menace et qu'on ne voit pas arriver (le scorpion de son blouson est subliminal). En somme, ce masque cristallise la menace générale et anonyme de l'histoire. Et d'un autre côté, plus que de ses occupants, la menace invisible semble provenir de la ville...




LA MENACE DE LA VILLE

Los Angeles. La nuit. Le climat de tension est une constante du film, où le danger viendrait fondamentalement des murs et de l'air de la ville. D'abord, le plan général en ouverture la fait ressembler à une gigantesque étendue de rues en feu. Vu des airs, le quartier de Downtown L.A. ne paraît être qu'une masse d'immeubles indifféremment noire et lourde. Les buildings reviennent en insert vus de dessus et de près, pour chapitrer le film, valorisant encore le vertige et les lueurs des rues. Dès le début de l'histoire et la course poursuite avec la police, on se sent en état de menace totale. Pendant cette scène, la caméra propose un angle principal : ce qu'on voit depuis l'intérieur du véhicule. Aucun élément de contexte ni d'angles secondaires ne permettent de s'approprier l'espace. Encore moins d'anticiper sur la présence de véhicules de police. On ne voit donc la ville que par le pare brise de la voiture – les yeux du pilote. Lorsqu'il conduit, la mise au point est très courte et les rues sont floues. D'autant que le caméra ne filme pas toujours vers l'avant. En cela, nous n'avons pas de repères géographiques, c'est la radio qui nous indique que nous fonçons au stade pour la fin du match. Quand il erre en ville comme dans un roman de Bret Easton Ellis, les feux verts lui laissent le champ libre. Mais chaque contrariété coïncide avec un feu rouge : ils marquent le visage du héros mutique, comme autant de portes sur ses pensées, des figurations. L'atmosphère sombre de la ville, les noirs profonds des intérieurs, sont possibles grâce aux caméras ARRI Alexa. Newton Thomas Sigel, directeur de la photographie, précise que leurs capteurs sont particulièrement résistants aux bruits numériques, permettant d'aller aux limites de la lumière. Il est connu pour avoir utilisé très tôt le digital sur des superproductions hollywoodiennes. Pour la diffusion au cinéma toutefois, les laboratoires ont généré des copies sur pellicules Fuji, que l'ont dit neutres en couleurs, pratiques donc pour une copie fidèle.
Le format utilisé est le nouveau cinémascope 2,40:1. Cependant, le format panoramique n'est pas utilisé pour ouvrir le champ : gros plans sur les visages, espaces confinés, scènes d'intérieur, salles de bains, ascenseur, vues conducteur, la majeure partie des plans clés sont étroits, renforçant encore l'idée d'objets aux services d'une ville anthropophage. Dans la première scène de poursuite par exemple, les voitures de police surgissent de n'importe où. Mais on ne voit aucun policier. Dans le seconde scène, une Chrysler 300C stationne à côté de la Mustang du pilote. Même constat, on ne voit personne à cause des vitres teintées. Lors de la tuerie du Pawn Shop, seule l'arme du propriétaire apparaît dans la lumière. Dans les dernières seconde du film, des ombres s'entretuent, etc. Dans la première scène exposée ici, de nuit au bord du ravin, les phares de la voiture s'allument au moment où elle démarre en trombe pour fracasser la limousine. Nicolas Winding Refn s'était interrogé sur la satisfaction à lancer une voiture de toute ses forces contre une autre. Présente et docile depuis le début entre les mains du héros, le montage et le cadrage la personnifient soudain ; elle s'approprie ce désir de mort imprégnant toute la fin du film. Ce n'est plus le pilote mais bien la voiture qui développe cette ultime agressivité hyper visuelle, rappelant Duel, Christine ou peut-être Death Proof.


Avec son esthétique multicolore, son fetish automobile, ses menaces nocturnes et son boss final, le film est considéré comme un « conte magique qui tourne au cauchemard ». Chaque épisode succède à l'autre comme autant de missions ; avec son esthétique rétro, ses lieux figés dans le temps, ses incursions d'éléments contemporains, le film paraît intemporel et finalement, Drive se rapproche de l'univers crade du jeu vidéo Grand Theft Auto, au-delà de l'histoire d'amour entre un cascadeur solitaire et sa voisine en danger.


Nicolas Winding Refn, Drive (2011)

D'après le roman de James Sallis, Drive (2005)

Photographie : Newton Thomas Sigel, ASC

2,40:1 digital, copies cinéma sur pellicule 35mm Fuji

Ryan Gosling, Carey Mulligan


Consultez l'itw : Drive without a driver, Wild Side Video, 2011


http://www.theasc.com/ac_magazine/October2011/Drive/page1.php


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25 avril 2014

LAST DAYS EST UNE PHOTOGRAPHIE !

Avril 1994. Voilà 20 ans que Kurt Cobain est mort. Gus Van Sant lui avait dédié un film en 2004 :

Last Days est une libre interprétation des derniers jours d'une rockstar grunge, dénommée Blake. Le parallèle avec la mort de Kurt Cobain nous incite à comparer les deux histoires. Pourtant ici point de Nirvana. Ce n'est pas un biopic. Dans ce récit, Gus Van Sant et Harris Savides nous laissent le choix : soit Blake est déjà mort, soit il va mourir. Le principe du flashback permet d'expliquer ce qui a été. Mais comment filmer ce qui est et ce qui va être ? Voici deux plan du même événement proposant à la fois deux états de mort et deux ellipses tournant sur elles-mêmes.


Last Days, Gus Van Sant (2005)

BLAKE EST DÉJÀ MORT :

Blake séjourne dans son manoir, apparemment évadé de sa cure de désintox. Reclus chez lui bien qu'hébergeant des amis, il cherche à s'isoler et se laisse flotter entre inspirations, pensées et souffrance physique.
Au matin, après qu'il soit entré dans sa chambre avec une carabine, Asia cherche Blake dans le manoir. Elle le trouve derrière la porte d'un salon, il s'effondre. La scène est très courte. Le début du plan est absolument sombre, puis la lumière entre au milieu du plan lorsque la porte s'ouvre. Les portes et les fenêtres sont des éléments récurrents du film, créant des jeux d'observateur-observé. Il y a deux phénomènes : nous sommes dans le noir, nous sommes loin dans le dos de Asia. Le plan est absolument fermé, nous repoussant en dehors, peut-être comme témoin. Tout est condensé en un plan : elle sait où le chercher, elle ouvre la porte, il tombe. Le film est résumé en une séquence. Elle demeure un instant contre le montant de la porte. Comment réagit-elle ? On ne voit pas son visage. Une coupe. Le film enchaîne avec tout autre chose. A-t-elle vraiment vu quelque chose ? Qu'a-t-elle fait ? Avons-nous vraiment assisté à la scène ? Elle pourrait prévenir les autres : « j'ai trouvé Blake derrière une porte... » Nous pourrions nous dire : « il est mort », voire « c'est comme ça qu'il est mort » puisque l'image de Kurt Cobain hante chaque plan.
Il y a trois plans où Blake demeure ainsi : sur son lit renversé en arrière, adossé à une porte, et étendu dans son abri de jardin au petit matin. Lorsqu'un plan ne comprend que cette information – je le cherche, il gît quelque part – on l'associe fatalement. D'un point de vue narratif, tout tourne autour du moment où il va mourir : dès lors qu'on est maintenu en suspens dès le début d'un film qui s'appelle texto : "Les Derniers Jours", n'importe quel signe répond à l'une des deux hypothèses : soit il est déjà mort, soit il va mourir.


Last Days, Gus Van Sant (2005)

BLAKE VA MOURIR :

Dans cette scène, Blake choisi un salon avec une télévision. Il se promène avec sa carabine, portant une robe qu'il vient d'enfiler. La première caméra est tournée de la fenêtre vers la TV, celle-ci depuis la TV vers la fenêtre. Positionnée bas, elle anticipe sur la chute très lente de Blake (un plan fixe de 1 minute 30) et crée une perspective convergeant vers la fenêtre, où la montagne s'aligne sur le papier peint en bas du mur. Harris Savides (directeur de la photographie) contrôle intégralement l'espace : il crée une perspective avec la cheminée, une profondeur de champ avec les deux fauteuils et un objectif grand angle, une fuyante avec la fenêtre et la raie de soleil et dans le même temps, écrase tout le plan en alignant le lointain – l'horizon – sur le fond de la pièce.
Blake fait un malaise, veut s'asseoir dans le fauteuil gris mais se trouve à ramper par terre. Une coupe. La caméra au sol est tournée vers la porte fermée. Il entre dans le champ et s'y adosse. Asia ouvre la porte et le fait tomber. Dans la chronologie, ce plan est tiré de la scène précédente, en contre-champ. La caméra tournée vers la porte où s'est adossé Blake nous révèle la suite : elle le redresse, referme la porte puis s'enfuit. Il se réveille. Le résultat, c'est un sentiment de mort mimée, un état de mort symbolique. Blake semble vouloir s'asseoir dans le fauteuil gris mais son corps s'écroule lentement sur lui-même. Il pend au dessus de son propre corps inerte. On dira que ses grosses chaussures sont ce qui est de plus stable. Jusqu'à ce qu'il touche le sol, il flotte au-dessus de ses chaussures lourdes et ancrées dans le sol. Un corps flottant au-dessus d'un autre corps : voici une représentation anticipée de la mort.
Ce point de vue plus intime – et ce type de flashback – est une façon pour Blake de raconter ce qui lui est arrivé aujourd'hui. Il nous détaille ce qui s'est passé tout au long de l'événement de Asia : le clip à la télé, le malaise, le fauteuil, la porte. Le plan fixe donne un fort sentiment de réalité puisqu'il n'y a pas de montage. Mais il nous empêche de nous sentir présents dans la pièce : Blake est seul dans les lieux et d'une certaine manière, ce que nous voyons, c'est l'explication qu'il nous donne de la scène de Asia. Le montage du film allant en avant, en arrière et en ellipse « autocentrée », ce flashback nous indique autant ce qu'il s'est passé, que ce qu'il va se passer. Autant que Blake et ses amis, on se prépare à ce qu'il meurt.


Voici donc une scène tournée sous deux angles, donnant la lecture sur l'intégralité du film. L'une est une hypothèse : et s'il mourait ? L'autre est une projection vécue de l'intérieur : et si je mourais ? Ce principe de flashback autocentré permet à Blake de raconter tout ce qui se passe autour d'un même temps de sa journée. Tandis que pour les autres il ne demeure à peu près que l'instant de sa mort, Blake nous livre à nous spectateurs tout le chemin dilaté de ses derniers jours.



Last Days, Gus Van Sant (2005) - 1,37:1
Photographie : Harris Savides
Blake : Michael Pitt

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22 avril 2014

GERRY EST UNE PHOTOGRAPHIE !

Gerry est un road-movie. Il y a une voiture, une route, des paysages, des plans gigantesques, des ciels, des nuages, des timelapses. Deux amis quittent la route et descendent de voiture pour marcher dans le désert. Ils ne parviennent pas à revenir sur leurs pas, nous les suivons. Nous sommes perdus au milieu d'un environnement qui ne peut interférer directement sur l'histoire : il est trop grand et trop loin pour ça. Il est d'ailleurs tellement inaccessible que nos deux héros se perdent. C'est une scène de théâtre vide. Aucun élément ne sert au récit hormis peut-être les nuages. Aucune colline plus qu'une étendue salée. C'est l'histoire de deux hommes perdus à l'exact milieu. Ce qui ressort de cette histoire, c'est le thème du double, entre dualité et gémellité, entre ce qui va les opposer et les confondre. Voici un film en format panoramique 2,35:1 aux longs plans séquences, d'un montage minimaliste mais très symbolique (100 minutes, 100 plans), tous signés Harris Savides.

Gus Van Sant, Gerry (2002)

LA DUALITÉ :

La dualité c'est le thème du duel. Elle désigne deux points de vues, deux postures ou deux axes, à propos d'un point. Il y a toujours deux facteurs à prendre en compte. Contraintes et contraires. Mais la dualité ne désigne pas nécessairement la confrontation ; elle peut désigner le binôme. Dans le thème du deux, la dualité esquisse la complémentarité : une divergence ou un écart qui sera utile au binôme.
Voici un plan où le ciel disparaît. C'est le deuxième jour. Une succession de collines arides s'écrasent dans le plan qui surplombe le binôme. Ils entrent par la gauche, minuscules, ayant à marcher encore plusieurs secondes pour occuper cette scène et se séparent au milieu du plan, qui lui ne bouge pas. Ils sont allé en voiture dans le désert puis ont décidé de se balader à pieds. Au bout de quelques heures, aucun indice ne les ramène à leur auto. Un genre de brouillard s'installe. Leurs deux préoccupations : trouver de l'eau et retomber sur une route. Nous les avons vus côte à côte depuis le début du film, filmés de près, nous les avons suivis en voiture, derrière eux et tourné vers eux, nous avons marché avec eux toute l'après-midi et soudainement, ne sachant plus revenir sur ses pas, le plan les rejette et demeure fixe. C'est dans ce plan qu'ils se séparent pour la première fois. À partir de ce point de bascule, leurs rapports vont se modifier. Casey Affleck accuse l'autre d'être le responsable. Il porte une étoile jaune sur son t-shirt et je ne peux m'empêcher de penser qu'il est le repère des deux. Celui qu'il aurait fallu écouter et suivre. C'est d'ailleurs lui qui parviendra à refaire mentalement leur parcours avec des indications de points cardinaux. Matt Damon porte du beige en bas et du bleu en haut, se fondant exactement dans les plans de collines sèches sur fond de ciel bleu. Partis ensemble en ballade, il sont contraints de se séparer pour mieux appréhender leur environnement. Désormais la nature n'est plus la liberté. Sortis de la plaine, ils évoluent dans des collines arides. Dans les plans suivants, souvent des plans séquences de plusieurs minutes, il y aura des rapports d'échelles perpétuelles entre eux et le désert, et, plus nuisible, entre eux deux. Non seulement il leur est nécessaire de partir dans deux directions, mais en plus l'un prend l'ascendant sur l'autre : Gerry-Matt Damon donne des instructions à son ami. Le problème de l'ascendant, c'est qu'il empêche la complémentarité, il perturbe les rapports du binôme. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le déroulement ira nécessairement vers la divergence tandis que nous spectateurs, ne voyons qu'un genre d'insecte de Kafka, une entité perdue, un minuscule corps à deux têtes cherchant à s'extraire du désert.


Gus Van Sant, Gerry (2002)

LA GÉMELLITÉ :

La gémellité est le thème du double, de la ressemblance, de la fusion. Elle tend à unir deux facteurs ou deux axes selon un même point. La différence entre les deux - duel et jumeau - est ainsi la différence entre la réunion et l'union (approcher et fusionner). Par exemple dans la dualité, la comparaison met en avant ce qui les oppose et ce qui les complètent. Dans la gémellité, c'est ce qui les rapproche ou les identifie.
Tout d'abord, les deux semblent s'appeler Gerry. Encore qu'il puisse s'agir d'un surnom tant on les entend utiliser gerry comme un adjectif : « you gerry-ed the Rendez-vous » « I was such a gerry ». Lire à ce sujet Gus Van Sant, de Stéphane Bouquet et Jean-Marc Lalanne, Cahiers du Cinéma, 2009.
Dans ce plan, nous avons repris la marche avec eux. En contrepied du plan de dualité, ce gros plan ne nous permet plus de distinguer quelconque élément spatial. Nous voyons deux visages se superposer, la mise au point lutant pour dessiner correctement un visage et quelques indices naturels (son, sueur, sol, souffle, soleil). Dans l'espace, nous savons juste qu'ils avancent vers le soleil. Harris Savides dit à propos des lumières du décor : «J'éclaire un endroit et laisse les gens l'habiter, contrairement à l'éclairage des personnes. C'est plus organique. […] Il y a une bataille constante entre la meilleure lumière pour leur visage et la meilleure lumière pour l'histoire.» Gerry 2, pour reprendre la dénomination des Cahiers du Cinéma, regarde un instant en arrière. La question du road-movie revient : Qu'y a-t-il au bout du chemin ? Quel est le but ? Retrouver la route ? Comment ? Qu'importe, il faut avancer. Ils ne peuvent plus envisager de questionnement intérieur ni de quête ; leur détresse physique est trop prégnante. Alors regarder derrière eux n'a aucune importance : ils viennent de nulle part. Leur précédent point d'arrêt – là d'où ils ont recommencé à marcher – ne correspond à aucun repère. Ils doivent se mettre en phase, au-delà de ce qu'ils pensent individuellement. Ils doivent oublier leur identité propre. C'est-à-dire qu'ils doivent trouver un élan commun, une stratégie commune et accepter qu'ils ne font qu'un : une entité à sauver. Un autre plan fera d'ailleurs s'approcher une troisième silhouette. Mi projection mentale, mi anticipation, c'est Gerry qui revient vers Gerry. Mais on sent rapidement que l'un tuera l'autre. Il n'y a pas d'indice. C'est la mythologie, autant que la littérature, les arts, qui nous affirme que l'un des jumeaux doit tuer l'autre pour survivre ! Autant que la caméra se place tant tôt derrière l'un, tant tôt en plongée de l'autre, on guette le fratricide. Effectivement, c'est lorsqu'Il le tue qu'il parvient à arrêter la voiture et s'échapper, d'abord en rêve puis dans la réalité. L'entité survit, une partie du corps s'émancipant de l'autre. Et elle reprend sa route.


On pourrait finalement considérer que l'histoire n'évolue pas, qu'on peut regarder le film dans n'importe quel ordre de séquences, et qu'on en revient toujours à deux corps perdus au milieu d'un espace. Gus Van Sant mettrait en pratique l'adage « ça et rien c'est pareil», dans un genre narratif (le road-movie) qui tend d'habitude à aller d'un point A à un point B. Ici on tourne physiquement en rond. Leurs rapports eux, semblent légèrement évoluer par paliers d'épuisement et de renoncement, conduisant à dire que la dualité c'est la survie ; la gémellité c'est la marche et la détresse.



Gus Van Sant – Gerry – 2002

format 2,35:1

Photographie : Harris Savides

Casey Affleck, Matt Damon




  • Lire : Gus Van Sant, Stéphane Bouquet, Jean-Marc Lalanne, Cahiers du Cinéma, 2009
  • Un lien trouvé par hasard : http://arts-jumeaux-doubles.blogspot.fr


Mes précédents articles :
Last Days est une photographie !A DAY AGO
Gerry est une photographie !3 DAYS AGO
Daft Punk's Electroma est une photographie !2 WEEKS AGO
A Single Man est une photographie !A MONTH AGO
In The Mood For Love est une photographie !A MONTH AGO

J'ai raconté ce sentiment du double en photographies, il y a quelques mois :





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9 avril 2014

DAFT PUNK'S ELECTROMA EST UNE PHOTOGRAPHIE !

Les robots français aiment le cinéma. Un cinéma : celui qui a diffusé chaque samedi Daft Punk's Electroma, à minuit pendant un an. ''Cinematographer'' pour l'heure, Thomas Bangalter a filmé Electroma dans un esprit de photographe, entre plans séquences et panoramas de malade où l'on prend le temps de regarder le décor. La conception sans dialogues l'éloigne des habitudes françaises, mais il demeure l'aspect dramatique : deux robots partent en quête d'humanité. Ayant d'abord collaboré avec de grands réalisateurs (Spike Jonze, Michel Gondry...), Daft Punk a eu envie « d'expérimenter le pouvoir des images, comme en peinture », créant par exemple une boîte de production en 2005, Daft Arts (sur les vidéos de Robot Rock et Technologic particulièrement), puis en présentant Daft Punk's Electroma au festival de Cannes 2006, sélectionné pour la Quinzaine des réalisateurs. Voici deux plans de ce voyage esthétique de 74 minutes.

D'autres image sur mon album pinterest!



Daft Arts, 2006 Daft Punk's Electroma

LE ROAD MOVIE :

La première partie du film se passe dans le désert californien à bord d'un coupé mythique, mais ici noir et sans écussons. Ciel bleu, sol jaune, macadam gris. La plaque d'immatriculation ''Human'' est un clin d'oeil à l'album Human After All sorti un an plus tôt. Nous découvrons la voiture de profil puis de face, dans deux plans fixes au silence absolu. Deux hommes casqués et en cuir noir ouvrent les portières et s'installent. Noir. Générique sur des flammes en gros plan. Noir. La route défile. A bord ils sont immuables, mutiques, presque immobiles. Le champ de vision étroit montre les abords de la route à travers le pare brise. La caméra depuis le siège arrière semble ne pas exister. Ce n'est pas le spectateur, ce n'est personne. Quand bien même nous serions avec eux, installés entre les deux sièges à regarder la route, ils ne considèreraient pas notre présence. On discerne à peine le ronflement du moteur, la macadam glisse, une bande blanche sert de rails.

Lorsqu'enfin nous les suivons depuis une route parallèle, un bruit vibre dans le bas côté ; obstrué par un talus, le travelling devient musical. Deux rapides plans de caméra montrent les deux robots depuis le capot puis grâce à la musique, la voiture semble aller plus vite. International Feel, scande la chanson. Et pour cause, il ne se prononcera pas un mot de tout le voyage, ni de tout le film. Thomas Bangalter disait à ce propos : « À Cannes, ils y avait des gens de tous les pays du monde, et sans dialogue ni sous-titres, on avait cette impression que tout le monde était ensemble dans cette même fiction » (Chris Hatherill, itw, Dazed, 07-2007). La route défile en continu ; de longs plans séquence permettent d'admirer le désert américain dans lequel la voiture n'a aucune aura en elle-même. Encore une fois, pas de logo, un moteur muet, pas de virages. La grue servant à la poursuite filme de haut comme dans un jeu vidéo, plaçant la voiture au centre de l'image. Quelque soit sa forme ou sa couleur, elle ne devient qu'un prétexte au jeu et à l'aventure.

On pense à tout un pan de l'histoire du cinéma indé avec cette introduction : un véhicule avance, un décor défile, deux personnages espèrent trouver quelque chose (d'ontologique) à l'autre bout du chemin, qui en principe va tout droit depuis nul part jusqu'à ce qu'on ne les arrête... Macadam à deux voies, Easy Rider, Stone, Duel, Paris-Texas, Gerry, Into The Wild... Le road movie est un style plutôt hermétique dans ce qu'il a à mettre en avant des routes, des paysages, des véhicules comme des personnage. Il faut aimer la route un minimum... Mais ici le sentiment est différent : le moteur reste au même régime, d'ailleurs on ne l'entend pas. Les deux robots ne parlent pas. La musique devient l'élément central de la composition. Les paroles des chansons correspondent à ce qu'on voit. Le but ? Leur quête d'humanité. Comment ? Aucune réponse il faut avancer. Alors quand ils arrivent en ville, on se dit : « c'est forcément La ville » qui est au bout de leur chemin. (Son vrai nom est Independence, dans le comté d'Inyo-CA).




Daft Arts, 2006 Daft Punk's Electroma

LA FUITE :

Les voici passés par ce laboratoire blanc où tout s'efface. Dans leur quête d'humanité, ils sont persuadés que leurs nouveaux masques d'êtres humains suffiront à accomplir leur dessein. De même que pour deux DJ qui se réfugieraient sous des casques à LED, rétorquantHuman After All. La population de la ville ne l'entend pas de cet œil et les chasse, sous un soleil de plomb qui fini de les punir en liquéfiant leurs peaux synthétiques.
Venus en voiture, chassés et aveuglés dans une ambiance de martyrs, contraints de fuir à pied, ils marchent. Dans un road movie, perdre son véhicule c'est se perdre tout court. La nuit tombe, le jour point. Aucune différence pour eux. Ce n'est pas la fatigue qui menace les robots mais un autre état humain : l'abattement. Tout autant qu'ils marchent côté à côte, la caméra avance collée à eux. On y est presque, dans leur monde. On voit le sol défiler dans le coin de l'image, l'horizon demeure à l'autre bout du monde.
Puis vient le premier panorama, une ligne de sable qui ne représente pas le sixième de la hauteur, et du ciel étalé. On peut remarquer des nuances dans le sable, parfois plus rouge ou plus jaune : l'heure et la température ont un impact sur les pellicules Kodak Vision : un soleil caché par l'horizon donne une atmosphère plus bleu, entre autres.
Contrairement au tout début du film où la même paroi de roche est filmée par six plans qui s'éloignent, la fin alterne entre proximité (craquelures du sol, reflets du soleil, des casques et du cuir) et horizon (immensité écrasant nos deux héros insignifiants). Et dans les ultimes plans au milieu du désert, à genoux avec le robot, on y est enfin, on est minuscule, face à face et on se regarde...



Me replonger dans Daft Punk's Electroma a surtout été l'occasion de me laisser couler dans des heures de clips, d'interviews, de live et d'albums du duo. Au milieu de tous ces souvenirs il y a ce long métrage qui m'électrise depuis sa sortie par sa simplicité et sa vision parallèle. Les sources sont difficiles à trouver, mais plusieurs petites interviews existent entre les Etats-Unis et le Japon. À sa sortie il y avait une version blanche avec un livret de photo et une version en boîtier aluminium, je pense qu'on peut encore les trouver.



Daft Punk's Electroma, 2006

Photographie : Thomas Bangalter

Je suis parti à l'autre bout d'une route il y a quelques mois. Une fois au bord de la mer, je me suis demandé si je n'étais pas arrivé contre une barrière. Alors j'ai joué avec les décors que j'ai trouvé.

Cliquez sur ce lien, c'est un texte.

Et voici ma série de photographies VOIR LA MER.

En parlant de cinéma et de Californie, lisez mon billet sur le film de Tom Ford : A Single Man est une photographie !


24 mars 2014

A SINGLE MAN EST UNE PHOTOGRAPHIE !

A Single Man est le premier film de l'ex couturier Tom Ford. George, qui a perdu son compagnon dans un accident de voiture, veut se suicider ce soir. Mais c'est en pensant qu'il n'y a plus rien pour lui, qu'il perçoit la beauté des jours. Comment la met-il en valeur ?

Plus de photogrammes sur mon Pinterest, cliquez ici!

Vendredi 30 novembre 1962, « se réveiller commence en disant je suis et maintenant ». Depuis son réveil dans sa villa signée John Lautner, (The Schaffer House - 1949), jusqu'au soir chez son amie Charley, George s'attarde sur tous les visages, tous les sons, toutes les formes, tous ceux qui ont perdu sens à ses yeux. Nous les verrons à travers le regard de George Falconer et les yeux de Tom Ford. Mark Kermode prévenait dans une interview : « peut-être que les lunettes peuvent donner une sorte de distance, mais elle vous guident aussi d'une certaine manière jusque dans ses yeux. » A Single Man, roman de Christopher Isherwood (1964), détaille la dernière journée de George, dans la Californie boisée et intellectuelle des années 1960. Tom Ford l'a adapté au cinéma en 2009, pour se concentrer sur ces détails d'objets, de formes et de rencontres qui rythment les heures. Pour son premier film comme réalisateur et producteur, il a choisi le jeune Eduard Grau comme directeur de la photographie, l'équipe de production responsable du design de Mad Men sur la chaîne AMC et Shigeru Umebayashi pour les musiques additionnelles, très proches de ses thèmes pour In The Mood For Love ; malgré ses 20 ans de mode, Tom Ford confie s'être entraîné à diriger par le « cut », pour ne pas perdre son équipe dès le premier jours, en ayant l'air de ne pas savoir ce qu'il faisait.


CADRAGE :

Le format choisi est le 2,35:1, utilisé habituellement pour ajouter du champ latéral dans la majeure partie des films grand spectacle d'Hollywood. Il nécessite une conversion optique pour comprimer la largeur du plan sur celle d'une pellicule film (35mm). Ici cependant, nous remarquons de nombreux travellings sur les décors pour embrasser ces mêmes espaces, sans ressentir d'effet de panorama. De la même manière, les portraits respirent peu : on est centré sur le visage de George, sur ses expressions. Il s'agit vraisemblablement d'une optique 100mm (la distance où l'image se forme depuis la lentille principale). On retrouve communément ces téléobjectifs en photographie pour le portrait (avec le 135mm) et les gros plans (avec le macro). Ici, le format Cinémascope ne sert pas à élargir le champ mais à le restreindre par le haut et le bas. C'est plus un sentiment d'étouffement que de promiscuité : on est près mais on est emprisonné.

Le film commence par un rêve puis un réveil vu de dessus. Tous les plans sont fixes. Le premier effet est un travelling au ras du sol puis une mise au point d'avant en arrière sur le lavabo. Elle aide à montrer plusieurs actions dans le même plan rapproché. Ces deux effets marquent une action dans l'espace, donnent de la profondeur, indiquent la distance entre nous et l'autre bord du plan. Puis c'est la lumière qui se met en scène, avec une source diffuse venant par la fenêtre.


Le ton stylistique est donné dès cette intro : beaucoup de plans serrés, des gros plans, des plans d'objets, des travellings sans panorama. Les pendules par exemple : pour matérialiser les instants de la journée, chaque pendule que George croise est exploitée par une photographie en gros plans. La caméra varie rarement entre les plans ; une fois le cadre décidé, l'action se déroule et s'immobilise furtivement. On peut noter certains travellings, latéraux, verticaux, avant ou arrière. Mais le point de vue semble unique. Le spectateur a le temps d'observer le décor dont la villa, les costumes créés par Arianne Phillips, les attitudes, les expressions de George. Lorsque le téléphone sonne et qu'il est aux toilettes par exemple, il va répondre avec le caleçon sur les chevilles, le plan au ras du sol mettant l'accent sur un George impeccable jusqu'aux sous-vêtements.


Dans la première scène de revolver, le plan de dessus est fixe, George posant son arme au centre du bureau et de l'image. Plusieurs gros plans se succèdent sur le barillet et les doigts qui l'actionnent. Puis le revolver revient au centre de l'image. Des objets se disposent sur les bords de l'image. Le revolver crée un champ autour de lui ; il semble attendre d'être ajouté au sac, personnifié par ce choix d'actions, de dispositions et de cadrages. Il est durablement le sujet de la scène.

Arrivant dans la salle des professeurs, il regarde attentivement la jeune secrétaire, les plans close-up extrêmes alternant entre œil droit, œil gauche et lèvres. L'attention particulière qu'il porte à ces éléments nous oriente sur son double sentiment de dernier regard et de regard pour la première fois. Le spectateur admire la précision du maquillage. Le même cadrage est reproduit plus caricaturalement lorsque Charley se maquille, indiquant une analogie avec l'univers de la mode et plus généralement sur les personnes qui l'attirent. Lorsqu'il devine le parfum, la caméra se contente d'un cadre et d'une mise au point extrêmement étroits sur le bord du col de la secrétaire, matérialisant l'odeur par les fibres de sa robe et son grain de peau.

Nous notons enfin deux types de caméra filmant vers l'intérieur : celle de sa villa lorsqu'il regarde dehors et celle depuis le couloir de son bureau, plus voyeur, quand il prend ses médicaments et du scotch.

Il y a ce poster de Janet Leigh immense sur le parking de la supérette : Tom Ford cite Alfred Hitchcock comme référence stylistique. Un autre clin d'oeil se glisse vers 19h quand George va dans sa salle de bains. Jon Kortajarena, le prostitué, est quant à lui le visage des collections Tom Ford. Une des rares scènes tournées caméra à l'épaule se situe lors du diner chez Charlotte, au moment de la danse : le cadrage légèrement de travers et instable, accompagné d'un point de netteté corrigée en permanence traduit leur ivresse. Différemment, la scène de bar démarre en demi teintes puis se colore quand Kenny entre. Ils s'installent dans un décor rouge et stable, rappelant la couleur du taille crayon de Kenny, pour laquelle George mentionnait le désir. A cet instant, il indique habiter juste à côté et sort son taille crayon jaune de sa poche. La pellicule utilisée est de type tungstène, faisant apparaître plus blanches les ampoules à incandescence, si bien que l'intérieur du bar est orangé et que l'extérieur est absolument bleu. Les couleurs sont l'autre point fort de ce film, en voici quelques indications.

MONTAGE :

Mark Kermode commençait sa revue ainsi : « Je ne savais pas qui était Tom Ford […] Il y avait des choses, comme les flashbacks en noir et blanc sur la plage, qui m'ont soudain paru être les réminiscences d'une publicité... ». Effectivement, le style au cadrage et le style de manière générale communiquent avec des industries très lourdes (mode, publicité), mais pas tant éloignées du cinéma. On évoque un tournage de 21 jours, ce qui peut passer pour un calendrier de court métrage. Après cette période marathon, les bobines Kodak 500T ont été numérisée puis traitées pour donner les variations de saturation correspondant aux états de George : de terne à saturé. Sachez aussi qu'en retirant le rim-jet, un dos contre-collé aux bobines de film, on obtient des films négatifs utilisables en photographie! Les couleurs sont impressionnantes, a l'exemple du projet Cine Still! (J'en ai quelques unes qui n'attende que ça!)

La scène d'ouverture est bleue, c'est un rêve. On retrouvera son pendant lors d'une baignade nocturne. A son réveil, la pièce garde cette teinte bleue et froide. Lorsque George se remémore son rêve pendant la journée, il est orange, ce qui nous colle d'une certaine manière dans la réalité. Puis nous remarquons que les souvenir sont plus saturés en couleurs chaudes. Par contre, lorsqu'il retrouve une photo noir et blanc datée de septembre 1947, la scène suivante prolonge le noir et blanc, avec un contraste mordant et un grain visible dans les gris et les flous.

L'ensemble du premier chapitre tend vers le blanc crème, désaturé et légèrement contrasté. A partir du coucher de soleil puis du repas chez Charley, la teinte est plus rose. Enfin le film repasse au bleu puis au orange pour le final.

Le plan du sourire de la jeune secrétaire passe de coloré à saturé. C'est le premier fading du film. Il nous indique que les émotions seront traduites ainsi : George est terne, mais chaque détail lui faisant ressentir quelque chose sera indiqué par des couleurs plus vives : les lèvres de la secrétaire, le buste des tennismen sur le campus, Kenny, ses souvenirs de Jim, etc. Un deuxième exemple est donné à la banque, lorsque la fille des voisins vient lui parler.

Pendant son cours, la copine de Kenny murmure, les visages en gros plans sont saturés. Puis les couleurs s'affadissent lorsque le plan revient sur l'amphithéâtre. Ensuite, Kenny discute avec George, le scène est toujours pâle. Mais lorsqu'ils s'arrêtent acheter des taille-crayons, la couleur s'amplifie : George le regarde différemment. Il y a donc deux scènes de variation puis nous comprenons tout de suite ce qui vient de se passer dans l'esprit de George. Le mécanisme se reproduit quand Kenny l'invite à boire un verre.

Notons maintenant différentes sortes de montage :

La scène des voisins au ralenti, muette avec une bande son, est un portrait de l'american way of life, avec des inserts plus pernicieux : l'enfant écrase un papillon, le père s'énerve contre la mère, elle tente de garder la face car ils sont dehors. La musique et le ralenti s'arrêtent brusquement lorsqu'elle adresse un salut à George qui les observe depuis ses toilettes. La scène ressemble à un souvenir mais le cut nous montre le contraire, nous sommes dans le présent, nous sommes dans le quotidien. Le film se situe sous le mandat de Kennedy, à la période des missiles de Cuba. Son collègue lui avoue avoir un superbe abri anti-missile. George imagine l'American Way of Life dans une sorte de garage, ressemblant à une peinture de fermiers cloisonnés, avec le mot SHELTER, indiquant à la fois le besoin de sécurité et l'impasse de ce mode de vie – et à plus forte raison celle de cette époque.

Quand il arrive chez Charley, le montage insert des flashbacks du soir de l'accident, comme un mauvais souvenir qui leur colle à la peau, un malaise auquel ils ne peuvent s'empêcher de penser. Enfin, le premier et le dernier tableau du film sont montés en symétrie : un cadrage par le haut, un travelling le long du lit.



A la sortie du film, le plan marketing a suscité une forte polémique, la plupart des inclinaisons gay ayant été masquées. L'affiche montre par exemple Charley, les bandes annonces soulignent des regards de femme. Quoiqu'il en soit, l'esthétique impeccable a pris le dessus, valant à Tom Ford le surnom de Design Director dans le New-York Times du 02 décembre 2009. A Single Man est un film très particulier par le traitement de sa couleur et l'utilisation du format scope pour des plans aussi serrés. Regardez-le avec attention et laissez vous surprendre par ce ballet de nuances et de styles...

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Lisez également mon article In The Mood For Love est une photographie !


A Single Man, Tom Ford (2009)

D'après A Single Man, Christopher Isherwood, 1964

Photographie : Eduard Grau

Avec : Colin Firth, Julianne Moore, Nicholas Hoult, Matthew Goode

SOURCES :

  • A Singular Man, Gregg Shapiro, The Bay Area Reporter, 2009
  • Peter Travers speaks with Tom Ford about "A Single Man.", abcnews.com/popcorn,2009
  • Tom Ford ANS A Single Man, ArtisanNewsService, 2009
  • Interview, Mark Kermode, 2010
  • Mark Kermode's review of A single Man, Simon Mayo, BBC 5, 2010
  • Interview, Andrew Freund, 2009
  • Wikipedia, Allociné, Youtube, Imdb, Panavision, Kodak pour certaines références

© DAMIEN LAMY, LYON 2014